Ici l'on fait ce que l'on veut
Crédits & contributions
- ÉditeurOBSIDIANE
- Parution10 mai 2019
- CollectionLes placets invectifs
Prix TTC
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Jean-François Regnard est né en 1655 à Paris ; il est mort en 1709 à Dourdan. Entre temps il mena une vie aisée mais mouvementée qu’il partagea entre le jeu, la littérature et les voyages. Visitant l’ltalie, il fut capturé au retour par les barbaresques et emmené comme esclave à Alger, ce qui ne le découragea pas des aventures puisqu’il s’en alla explorer le Grand Nord dont il ramena un curieux Voyage en Laponie. Revenu en France en 1683, il se lança dans la carrière littéraire comme auteur dramatique et rencontra maints succès avec, notamment, Le Joueur (1696), Le Retour imprévu (1700), Les Folies amoureuses (1704), Les Ménechmes (1705) et, ce qui est sans doute son chef-d’oeuvre, Le Légataire universel (1708). Non content d’être un dramaturge à succès, Regnard mania aussi la satire avec une grande habilité. C’est cet aspect peu connu de son talent que nous donnons à lire principalement ici… Pourquoi donc lire aujourd’hui ce Regnard qui, toute sa vie, joua par trop de chance ? Pour deux raisons au moins, dont chacune serait à elle seule suffisante. Tout d’abord Regnard fut un excellent observateur d’une époque qui n’en manqua certes pas. Le Grand Siècle n’est pas ce qu’un vain peuple pense. Passé l’enthousiasme des débuts du règne personnel de Louis XIV, le goût immodéré du Grand Roi pour les guerres et les belles bâtisses, passe-temps fort coûteux, finit pas lasser ses sujets. Par ailleurs, le monarque a certes réussi à mettre au pas une noblesse d’épée un peu trop remuante (ce qu’un Saint-Simon ne lui pardonnera jamais), mais les places sont occupées désormais par des gens qui ne valent guère mieux. Dans les troubles de ces dernières années du règne, la guerre, qui ruine le pays, enrichit une bourgeoisie toujours prête à profiter des crises. Tout le théâtre de Regnard, comme d’ailleurs celui de Lesage à la même époque, ne cesse de le démontrer. Les marquis, chez Regnard, sont la plupart du temps de faux marquis, comme les dévots de La Bruyère sont de faux dévots. C’est qu’il n’en coûte pas cher, en cette fin de règne, de prendre indûment un titre nobiliaire pour se pousser dans le monde. Le chevalier de sa comédie des Ménechmes peut s’écrier : « J’achèterai je pense / Deux ou trois marquisats des mieux rentés de France. » Et si son valet, dans un alexandrin qui en dit long, fait l’éloge de : « La belle impression ! les beaux noms ! le beau style ! », ce qui cause un tel enthousiasme, ce sont les billets au porteur de son maître. La fortune est tout désormais : voici venu le temps des financiers. La seconde raison qui devrait nous inciter à lire Regnard, et en particulier sa poésie, c’est qu’il manie les vers en virtuose, avec un brio et une élégance rares, particulièrement à son époque. Sa versification, toujours correcte, donne une impression de fluidité, et même de facilité, qui ne doit pas tromper. Il y a là, à n’en pas douter, autant de travail que de dons et cette légèreté, ce naturel dans l’expression (qui, de fait, n’est jamais forcée) est la marque des grands. Regnard, apôtre de la joie, chantre du bonheur de vivre et de la liberté, a dû forger lui-même ses outils. Il a su se donner les moyens adéquats pour chanter l’amour, l’amitié, le plaisir d’être ensemble et de partager. En ces années où s’achève un trop long règne, à la charnière d’un siècle épuisé et d’un siècle qui n’ose encore paraître, cette nature qu’on a le sentiment de redécouvrir, ce bonheur qui est une idée neuve, Regnard met à les chanter toute sa ferveur et tout son talent
