Les coulisses de l'irrationnel

Dans un monde qui peut légitimement se targuer d'avancées scientifiques transformatives, ce n'est curieusement pas la Raison qui triomphe mais l'Irrationnel. Nos sociétés se déconstruisent, perdent tout compas moral. Les violences physiques et verbales se banalisent, les conflits se multiplient. À bien des égards, le monde des années 2020 ressemble à celui des années trente décrit par Musil, et Broch dans Les Somnambules. Avec le regard d'un personnage rêveur et attachant, John Kerr, et la ville de Chicago en toile de fond, son architecture et son cosmos culturel, l'auteur décrit un monde de somnambules, de personnages qui se côtoient, parlent beaucoup mais disent peu de choses. C'est un monde de monologues juxtaposés et non de dialogues. Si Broch suggérait un retour à l'esprit religieux comme porte de sortie pour quitter les ténèbres, réconcilier les contraires puis retrouver la lumière, l'auteur propose l'horizontalité dans les années 2020, la redécouverte de l'écoute de l'autre, de notre humanité, le respect de l'altérité et la résurrection du lien. Ceci lui semble possible si chacun accepte de faire moins de choses mais s'efforce de les faire mieux. Avec Les coulisses de l'irrationnel, Hugues Schrepfer utilise le vecteur de la fiction pour livrer sa pensée dans ce premier roman. De formation scientifique et financière, il poursuit sa carrière essentiellement à Chicago, aux États-Unis. Des expériences dans le domaine de l'enseignement complètent également son parcours.