Tout sauf jubilatoire
par Claude POUX
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Mon cul, oui… se dit-elle en lui lançant un regard sournois. Elle était à chaque fois effarée qu’il puisse arguer de ses fréquents déplacements à l’étranger comme interprète de colloques, réunions ou séminaires pour estimer que c’était autant de sa faute que de la sienne. C’était cela qu’il appelait des torts partagés ? Le quotidien d’une femme qui travaille ? Ce n’était pas tant cette aventure qui l’avait écœurée que les mensonges et l’aplomb qu’il mettait désormais à défendre sa position, comme si tout homme seul à la maison baisait nécessairement à droite et à gauche, tout en se préoccupant à titre personnel de la survie de l’espèce. Elle ne céderait pas. Francis se rapprocha. Il avait sa mine des mauvais jours, enfin son air habituel, pensa-t-elle machinalement, se retenant pour ne pas sourire de ce lapsus involontaire. — Tu sais très bien que nous n’avons plus rien en commun, commença-t-il. Camille ne tourna pas la tête, concentrée sur l’article évoquant le malaise de la pêche suédoise. — Écoute-moi quand je te parle ! Ne fais pas semblant de lire tes journaux débiles que tu es la seule à feuilleter ! Même les Suédois ont mieux à faire ! s’emporta-t-il d’un coup. — Je t’en prie, ne recommence pas avec ça… — Avec ça ! Parce que ça, comme tu dis, c’est ma vie, c’est mon droit de vouloir vivre comme je l’entends ! — Tu ne m’as pas attendue pour le faire, dit-elle d’une voix faible. Tu t’es même passé de mon accord à l’époque. — Bordel ! Tu ne sais que répéter toujours la même chose ! C’est du passé… ce que je veux, c’est repartir maintenant… — Personne ne t’en empêche. Pars. — Je veux divorcer, cria-t-il en appuyant sur chaque syllabe. Camille se leva, le regarda à la manière d’un oursin dérangé pendant sa sieste dans un banc de sable fin et quitta la pièce, le laissant furieux et désemparé. — Putain, Camille, cria-t-il à l’intention de la jeune femme qui venait de sortir, j’ai cinquante-et-un ans et j’ai envie de vivre !
